SOMMAIRE
- I. Élaborer et partager une charte éthique claire
- II. Promouvoir une communication transparente et régulière
- III. Garantir la transparence financière du réseau
- IV. Renforcer la culture de la transparence dans les relations franchiseur-franchisé
- V. La Responsabilité Sociale et Environnementale des réseaux de franchise
- VI. Les avantages et les défis posés par l’éthique et de la transparence pour le franchiseur
- VII. Tendances futures et évolution des pratiques éthiques dans le secteur de la franchise
- Conclusion
Le modèle de la franchise repose sur une collaboration étroite et durable entre deux entités indépendantes que sont le franchiseur et les franchisés, et dans le respect de leurs engagements contractuels. Mais si cette relation veut alimenter un sentiment de confiance mutuelle et garantir la pérennité du réseau, elle doit dépasser la dimension juridique, pour inclure des valeurs fortes comme l’éthique et la transparence.
En l’occurrence, de plus en plus de franchisés ne se contentent plus des piliers traditionnels que sont la marque, le savoir-faire éprouvé et l’assistance : ils veulent s’engager auprès d’une enseigne vertueuse, dotée de pratiques transparentes. Rappelons que dans la 19ème édition de l’étude de la franchise réalisée par Banque Populaire (2023), 65% des candidats s’intéressaient à la déontologie d’un réseau avant de le rejoindre.
Dans cet article, nous allons montrer comment un franchiseur peut développer une culture éthique et transparente, tout en renforçant la solidité et la cohésion de son réseau. Nous explorerons également les avantages concrets de cette approche, les défis à surmonter, et les tendances futures dans ce domaine.
Bonne lecture,
L’équipe Axe Réseaux
Fidèle à sa réputation, Axe Réseaux aide le dirigeant de tout concept prometteur à développer sa franchise.
I/ Élaborer et partager une charte éthique claire
1.1/ La nécessité d’un cadre favorable dès le départ
Un réseau de franchise qui aspire à la transparence peut commencer par établir une charte. A mi-chemin entre une constitution et un règlement intérieur, ce document de référence définit un cadre clair de fonctionnement et rappelle les valeurs que chaque membre s’engage à appliquer et à défendre, en rejoignant l’enseigne.
« Cela ne doit pas être une vague déclaration de principe telle qu’on en retrouve parfois sur les supports marketing », rappelle Laurent Delafontaine. « L’idée est de rendre ces principes cardinaux suffisamment précis pour les rendre opposables aux franchisés, qu’ils puissent y inscrire leurs comportements et que le franchiseur soit en mesure de pouvoir apprécier d’éventuels écarts. Dans ce cas, le contrat de franchise doit y faire une référence explicite, comme avec le manuel opératoire », complète-t-il.
Son contenu peut porter sur de nombreux points et mettre l’accent sur des aspects qui sont critiques pour l’enseigne. Par exemple, on peut imaginer qu’une enseigne de centres de beauté désireuse de renforcer son attractivité auprès des candidats, demande de suivre des pratiques commerciales honnêtes et transparentes, respecte des normes de service et privilégie certaines soft skills ; et qu’en retour, le franchiseur s’engage à établir une communication sincère sur les performances du point de vente.
1.2/ La formation des franchisés aux principes éthiques
Tous les franchisés n’ont pas la même sensibilité et la même compréhension des valeurs en affaires. Le franchiseur doit donc les former à ces questions au plus tôt, c’est-à-dire dès leur formation initiale. Un module dédié portera sur l’importance de l’éthique dans la relation client, la gestion des collaborateurs et bien entendu les rapports avec le franchiseur.
Pour autant, la formation ne doit pas être un alibi. Comme dans un contrat de franchise, les partenaires du franchiseur veulent que la préoccupation ne soit pas à sens unique … « Ils doivent sentir que la tête de réseau prend sa part, en communiquant par exemple avec transparence sur l’allocation des fonds de la redevance publicitaire, ou s’engage à effectuer une enquête de satisfaction annuelle par une agence spécialisée, et à améliorer concrètement d’une année sur l’autre les points qui laissent à désirer », détaille Laurent.
Enfin, la formation peut aussi être continue. Rien n’empêche l’enseigne de proposer de nouveaux modules sur des questions qui émergent comme nécessaires, avec l’expérience du terrain. Par exemple, les animateurs peuvent constater que les franchisés souhaitent davantage de transparence quant aux coûts d’approvisionnement, et ce point peut être instruit par une « commission vie interne » avant de se traduire par une nouvelle action de formation.
1.3/ Le renforcement de l’éthique via des audits internes
Au-delà des documents et des formations, il faut vérifier que les parties appliquent les normes du réseau en la matière. A ce titre, le franchiseur peut programmer des audits qui porteront sur tout le spectre éthique de l’exploitation du point de vente. Sinon, il peut diligenter des campagnes de client mystère pour vérifier la bonne application de process relevant par exemple de l’accueil et de la relation client.
Le résultat de l’audit est communiqué au franchisé par son animateur réseau, et fait ensuite l’objet d’un suivi voire d’actions correctives, comme cela est fait habituellement sur un plan opérationnel.
II/Promouvoir une communication transparente et régulière
2.1/ La fluidité dans la transmission d’informations
Pour le bon fonctionnement du réseau, il est essentiel que l’information opérationnelle comme financière circule avec fluidité entre le franchiseur et ses franchisés. Plus un franchiseur partage d’informations avec ses franchisés, plus il les implique dans la réussite du réseau et moins ceux-ci peuvent lui reprocher l’opacité.
Dans cette logique, le système de reporting adopté est déterminant. « Normalement, chaque franchisé connaît les indicateurs de performance (KPI) référents pour son enseigne. Ils offrent une base de comparaison pour la performance de tous les points de vente, et seront pour certains transmis sous forme de moyenne aux futurs franchisés lorsqu’ils voudront établir leur business plan », explique notre expert.
2.2/ Les outils numériques comme vecteurs de transparence
Les technologies digitales favorisent cette aspiration en franchise. L’utilisation de logiciels dédiés voire de progiciels complets (par exemple Cerca), permet aux franchisés d’avoir un accès direct et en temps réel à des données dont ils tiendront compte pour ajuster leurs actions marketing, leurs opérations commerciales et optimiser leur gestion.
Autrefois installés sur PC, les franchisés, y accèdent aujourd’hui en Saas depuis leurs tablettes et autres smartphones. « Un nomadisme indispensable pour que l’exploitant soit plus réactif et agile dans la mise en oeuvre de sa propre stratégie. Sachant que les réseaux les plus avancés développent même leur outil propriétaire et leur propre app », relève Laurent.
2.3/ Encourager les échanges horizontaux entre franchisés
La dynamique de la franchise étant traditionnellement plutôt verticale, les rapports horizontaux ont longtemps été le parent pauvre de la vie des réseaux. Cependant le franchiseur a tout intérêt à encourager et à fertiliser les rapports entre les franchisés. Et la transparence est un motif légitime pour ce faire.
Concrètement, les pratiques ne manquent pas. « Vous pouvez organiser des espaces d’échange et autres forums sur votre portail intranet, voire déployer une solution de réseau social d’entreprise – comme Yammer (la solution de Microsoft 365). Autre possibilité, les groupes de partage en visio ou idéalement en présentiel (jusqu’aux séminaires), pour que les franchisés partagent leurs bonnes pratiques et puissent soumettre diverses problématiques à leurs pairs », détaille le consultant. De quoi rendre concrète une culture de l’entraide, pour renforcer la cohésion et le sentiment d’appartenance au réseau.
III/ Garantir la transparence financière du réseau
3.1/ Les obligations légales en la matière
Selon les termes de la loi Doubin ensuite codifiés dans le code de commerce, tout franchiseur est tenu d’informer ses futurs franchisés quant aux implications financières de son engagement dans son réseau et ce avant la signature du contrat : montant total d’investissement, apport personnel, droit d’entrée, royalties, redevance publicitaire, abonnements, achats exclusifs, etc.
Si ces données doivent figurer dans le fameux DIP, le franchiseur peut aussi aller plus loin dans la réassurance de ses partenaires. « La compliance à la législation prescrit de communiquer au candidat à la franchise les comptes de la société tête de réseau, et ce pour les deux derniers exercices. Mais ça ne l’éclaire pas sur la manière dont va se comporter son futur point de vente ! Voilà pourquoi la plupart des franchiseurs communiquent également des moyennes tirées des bilans de leur parc de franchisés », rappelle notre fondateur. Cela réduit le risque de litiges ayant pour fondement des attentes financières irréalistes.
3.2/ Fournir un état périodique et précis de certaines dépenses
Franchiseur et franchisé ont beau être des partenaires juridiquement indépendants, ils restent souverains en matière de gestion, sous peine d’ingérence notamment de la part du premier. Néanmoins, la tête de réseau est attendue sur la manière dont elle engage certains fonds communs. C’est le cas de la redevance publicitaire, abondée par chaque franchisé à concurrence de 0,5 à 1,5% de son CA, en moyenne.
« Dans la pratique, la tête de réseau procède comme elle l’entend et a le choix du format et de la périodicité de cette communication. Le mieux est qu’elle soit transparente non seulement sur l’emploi des fonds mais aussi les résultats des investissements engagés. Et pour compléter le dispositif, elle gagnera à y associer des franchisés référents sur le sujet. Cela évite que les franchisés tombent des nues la fois d’après ! », relève celui qui est aussi formateur à l’Académie de la franchise.
3.3/ Auditer la performance des franchisés pour plus de transparence
Nous sommes d’accord que le franchiseur ne peut se comporter comme le commissaire aux comptes de ses franchisés. Mais l’animateur de réseau est fréquemment à son contact et il a de nombreuses cartes en main pour challenger sa performance et lui adresser des messages à titre préventif. Une vigilance qui porte en particulier sur les ratios-clés du réseau.
Mais il peut aller plus loin. « Il est courant que l’enseigne référence un ou deux cabinets comptables, et négocie avec eux un accompagnement-type, qui est censé couvrir les besoins d’un franchisé. Il peut être judicieux d’y intégrer un audit ou une situation comptable périodique, qui offrira un “instantané” au franchisé. Ce dernier pourrait s’engager à le partager à son animateur, pour voir s’il est bien dans les clous de son prévisionnel », suggère Laurent Delafontaine.
IV/ Renforcer la culture de la transparence dans les relations franchiseur-franchisé
4.1/ La confiance mutuelle comme fondement de la relation franchiseur-franchisé
Au-delà des aspects financiers ou opérationnels, il est crucial d’instaurer un climat de confiance entre les parties. Pour chacune d’elles, cela passe par l’écoute, la franchise, la disponibilité et le soutien actif du franchiseur mais aussi l’engagement du franchisé à tenir compte de ses recommandations et à adopter les bonnes soft skills.
Des dispositifs spécifiques peuvent même venir compléter cette base. « Selon les impératifs de votre activité, vous pouvez imaginer une hotline disponible 24h/24, pour répondre aux besoins urgents des équipes franchisées. Cela peut aussi prendre la forme de formations sur-mesure, voire d’un coaching – tout en respectant certaines limites », prévient le praticien. Ce genre de dispositions impacte très directement le niveau de satisfaction du franchisé, et favorisera la reconduction de son engagement contractuel.
4.2/ Encourager la remontée des feedbacks franchisés
Un franchiseur soucieux de transparence doit encourager ses franchisés à partager leurs retours d’expérience, comme leurs critiques. Cela l’aide à mieux comprendre les défis auxquels ils sont confrontés, et à ajuster sa posture en conséquence, sur une base réaliste.
Par exemple, vous pouvez mettre en place une plateforme anonyme où vos franchisés partageront leurs avis et signaleront des problématiques, sans crainte de représailles.
4.3/ La gestion transparente des conflits
Inévitables en franchise comme dans toute relation d’affaires, les conflits doivent surtout être bien gérés. Pour Laurent, « en plus de contribuer à maintenir une bonne entente au sein du réseau, les procédures prévues pour les résoudre, comme la médiation, contribuent à votre transparence et valorisent votre éthique de franchiseur ».
Certaines enseignes désigneront un médiateur interne chargé de résoudre les différends avec leurs franchisés, garantissant une approche juste et impartiale. Cette approche réduira le nombre d’actions contentieuses, qui peuvent s’avérer coûteuses pour les deux parties.
V/ La Responsabilité Sociale et Environnementale des réseaux de franchise
5.1/ Intégrer des principes de RSE dans la charte éthique
Les franchiseurs sont également attendus sur le terrain de la responsabilité sociale et environnementale (RSE). Ils peuvent commencer par intégrer des principes s‘y rapportant, dans la charte du réseau.
« Cela permet de sensibiliser l’ensemble des franchisés à ces enjeux. Et c’est d’autant plus logique si votre enseigne est certifiée ou labellisée, par exemple B-Corp ou bien membre d’un collectif engagé comme Génération responsable », observe notre consultant.
5.2/ Encourager les initiatives locales en matière de RSE
Ensuite, les dirigeants de réseaux peuvent encourager leurs franchisés à s’engager dans des initiatives locales de RSE. L’objectif étant de compléter le dispositif national par un ancrage territorial de la marque, auquel les consommateurs locaux seront particulièrement sensibles.
Par exemple, il est courant que les enseignes de distribution alimentaire incitent leurs franchisés à nouer des partenariats avec des producteurs locaux et des associations caritatives locales.
5.3/ Reporter dans la transparence quant à vos actions RSE
Être transparent quant aux actions menées en matière de RSE peut nourrir votre avantage concurrentiel. Non seulement cela renforce la confiance de vos clients, notamment les plus jeunes générations sensibles à ces arguments. Mais également celle de vos candidats et de vos salariés.
Mais l’autre avantage est celui de la preuve. « Par définition votre reporting témoigne d’actions qui ont concrètement été entreprises, à l’aune de vos engagements. Nous sommes ici dans la démonstration – à l’opposé d’un greenwashing qui n’abuse plus grand monde … », souligne Laurent.
VI/ Les avantages et les défis posés par l’éthique et de la transparence pour le franchiseur
6.1/ Les avantages
a) Le renforcement de la marque et de la réputation
Une franchise vertueuse bénéficie d’une meilleure réputation, ce qui attire plus de clients, de meilleurs candidats franchisés et de meilleurs salariés.
b) L’amélioration des performances financières
Se montrer vertueux et éthique dans les pratiques commerciales conduit souvent à de meilleures performances financières.
« Les franchisés d’enseignes au modèle économique vertueux, qui font confiance à leur franchiseur, suivront davantage les recommandations de la tête de réseau et réinvestiront davantage dans leur entreprise », assure Laurent.
c) La réduction des litiges et des coûts associés
Enfin, une conduite transparente et éthique réduit significativement le nombre de litiges au sein du réseau. Cela se traduit par d’importantes économies en frais juridiques, en médiation et en temps consacré de gestion des conflits ainsi qu’à traiter le bad buzz sur les réseaux …
6.2/ Les défis et obstacles à la mise en place d’une culture éthique et transparente
a) L’inévitable résistance au changement
La mise en place d’une culture éthique et transparente peut se heurter à des résistances, si la gouvernance est inadaptée mais aussi de la part de franchisés habitués à d’anciennes pratiques.
« Il est essentiel d’être pédagogue et de savoir mettre en avant les avantages de cette nouvelle approche. Et surtout, ne vous privez pas d’impliquer les franchisés dans cette évolution : s’ils en sont les co-architectes, il leur moins facile de la remettre en cause », argumente notre consultant.
b/ L’ampleur des coûts initiaux
L’implémentation d’une charte, de processes opérationnels et de reporting transparents et la formation des franchisés aux principes éthiques représentent un budget conséquent. Ajoutez-y aussi le coût occasionné par la compliance au RGPD en Europe, car la gestion des données personnelles est également devenue un enjeu de probité pour les réseaux de franchise.
Quoi qu’il en soit, ces coûts doivent être considérés comme un investissement à long terme dans la bonne santé du réseau. Vous devez les répercuter équitablement dans le montant de votre droit d’entrée.
c/ L’équilibre à respecter entre transparence et confidentialité
Enfin, il peut être délicat de trouver le bon équilibre entre une transparence nécessaire et une protection légitime des informations stratégiques du réseau.
Mais avec le temps, vous apprendrez à définir clairement quelles informations peuvent être partagées et lesquelles doivent rester confidentielles. « C’est aussi à cela qu’on reconnaît un franchiseur expérimenté et sage », souligne le membre du collège des experts de FFF.
VII/ Tendances futures et évolution des pratiques éthiques dans le secteur de la franchise
7.1/ L’utilisation de la blockchain pour plus de transparence
Bien que les cas d’usage soient encore rares, la technologie blockchain offre de nouvelles possibilités pour améliorer la conduite des réseaux de franchise.
C’est notamment le cas en matière de traçabilité des produits, comme l’a initié Carrefour depuis quelques années.
7.2/ Peut-on envisager de mobiliser l’Intelligence Artificielle, s’agissant d’éthique ?
On assiste à une utilisation croissante de l’intelligence artificielle – a minima les IA génératives, par les réseaux. Toutefois, les perspectives d’une automatisation excessive de la prise de décision, et donc d’une perte de contrôle, freine encore de nombreux franchiseurs.
« J’observe lors de mes échanges avec les dirigeants qu’ils ne sont pas prêts à faire un “chèque en blanc” à cette technologie, au nom de l’efficience. La culture et la gouvernance des réseaux est encore largement relationnelle et humaine et c’est aussi un vrai garde-fou éthique, en attendant que l’encadrement de ces avancées progresse. Je préfère m’en réjouir », tempère donc le président du cabinet.
7.3/ Vers une certification des réseaux de franchise
Enfin, nous observons une tendance croissante à la certification des réseaux, d’abord sur le terrain de la qualité, puis de la satisfaction interne et des pratiques responsables.
Ces préoccupations devraient logiquement converger vers l’éthique et la transparence, rendant plus objective encore la prise de décision des candidats à la franchise, mais aussi des investisseurs à l’occasion de levées de fonds et d’opérations de haut de bilan.
Conclusion
Nous espérons que cet article vous aura sensibilisés à l’intérêt de développer une culture de la transparence et de l’éthique pour votre réseau de franchise.
Voilà un travail exigeant mais noble et vertueux, qui contribuera de manière décisive à la valorisation de votre marque. Pensez-y !
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